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Rencontre avec Célia Ghoul, créatrice de #Libérezlesshojos Rencontre avec Célia Ghoul, créatrice de #Libérezlesshojos

Interview

#Libérezlesshojo : rencontre avec Célia, créatrice du hashtag devenu viral

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À l’occasion du deuxième anniversaire de #Libérezlesshojo, nous avons eu le plaisir d’échanger avec Célia, créatrice du hashtag devenu rapidement viral sur les réseaux sociaux lors de sa création le mi-juillet 2022. Et si on essayait d’en savoir plus sur la création de ce hashtag et la vision du shojo manga en France de la créatrice du mouvement ? Découvrez l’interview dans cet article !

Tu as créé le mouvement #Libérezlesshojo sur Twitter en 2022. Peux-tu nous expliquer pourquoi ?  

J’ai lancé ce hashtag après avoir constaté plusieurs choses dans le milieu du manga. Tout d’abord, il y a eu une véritable effervescence autour des collectors, notamment des collectors shonen et seinen. D’un point de vue extérieur et en tant que lectrice, j’ai vu cela comme une sorte de monopole. Ma question était donc la suivante : Quid des collectors pour les shojos manga ? Nous avions en France un shojo manga comme Yona : Princesse de l’Aube qui comprend 40 tomes avec un public assez fidèle et je n’ai vu aucun collector pour ce titre et très peu pour d’autres shojo manga. À titre de comparaison, les autres pays européens sortaient des collectors pour des shojo mangas… Donc pourquoi une telle différence ? C’est pour cela que j’ai lancé un thread avec un hashtag #Libérezlesshojo

Trailer officiel Yona, Princesse de l’Aube

Tu avais fait part aussi d’une certaine frustration par rapport aux nouveautés shojo manga qui sortaient dans d’autres pays mais qui tardent à arriver en France. Peux-tu nous en dire plus à ce sujet ? 

Je ne dirai pas vraiment frustration mais… beaucoup de questions plutôt. En France, lorsqu’on entend parler de shojo manga, pas mal de personnes assimilent ce terme à la romance lycéenne et malheureusement, cela a généré de mauvais et faux préjugés sur la catégorie éditoriale. Il existe tellement d’autres types d’histoires dans le shojo manga ! J’avais notamment parlé de Love of Kill qui n’est pas du tout une romance lycéenne. Lorsqu’on compare avec ce qui se passe au Japon, il y a des titres à succès en shonen et seinen qui trouvent une résonance en France. Pourquoi n’est-ce pas le cas avec des best-sellers shojo manga au Japon ? 

Trailer officiel Love of Kill

Suite au mouvement #Libérezlesshojo as-tu noté une différence ou pas du tout que ce soit d’un point de vu des lecteur.rice.s et/ou des maisons d’édition ? 

Je pense que #Libérezlesshojo a permis à certaines personnes de prendre la parole et de parler davantage de shojo manga qu’auparavant. Pour preuve, ce hashtag a été utilisé plusieurs fois, par des lecteurs, lectrices et même par des maisons d’édition comme les éditions Akata. Avec cet engouement et toutes ces prises de paroles, pour moi il était évident que les maisons d’éditions devaient être à l’écoute. Si certaines maisons d’édition ont pu être braquées par l’étendu de ce mouvement, ce n’était pas le but ! Nous voulions seulement faire comprendre notre ressenti et, bien heureusement, des maisons d’édition ont su montré une certaine écoute et compréhension.

En plus du terme « shojo manga », nous entendons aussi un autre terme ; le « josei manga ».  Que signifie-t-il pour toi ? Le mouvement #Libérezlesshojo inclut-il aussi le josei manga ? 

Pour moi, c’est principalement une question de sémantique. Je sais que certaines personnes considèrent que le josei manga n’existe pas mais je suis, pour ma part, persuadée du contraire. De manière littérale, le josei manga vise un public majoritairement féminin et adulte. Il existe d’ailleurs au Japon des magazines qui mettent en avant cette sous-catégorie éditoriale. Donc, oui, le josei manga découle du shojo manga et il existe bel et bien. Donc, en conséquence, oui, le mouvement #Libérezlesshojo inclut naturellement les josei manga. D’ailleurs, on parle aujourd’hui davantage de « shojosei »

Ce qui plaît dans les shonen, au-delà des scènes d’actions, on parle beaucoup aussi de « leçons de vie » qui marquent le lectorat. Qu’en est-il du shojo manga ? 

Si je peux recommander une lecture de shojo manga, je conseillerai de commencer à lire un manga écrit pour les femmes par des femmes. Vous verrez une différence fondamentale avec l’écriture masculine que nous pouvons retrouver dans quelques shonen.

La subtilité et la vision de la vie sont vraiment différentes. Lorsqu’on compare la description des sentiments et des émotions dans un shonen ou dans un shojo, l’amour qui peut être décrit est développé de manière vraiment inédite lorsqu’une femme l’écrit. Cela fait vraiment toute la différence.

D’ailleurs, je vous invite à regarder comment le sexisme est abordé dans un shojo manga. Que ce soit les sentiments, la reconstruction… Les shojo mangas donnent bien des leçons de vie, surtout lorsqu’ils sont écrits par des femmes. Testez et vous verrez ! D’ailleurs, ce n’est pas un shojo manga mais je vous invite vivement à lire Sounds of Life qui est écrit par une femme. Les émotions que l’autrice transmet à travers cette histoire sont incroyables. 

Trailer officiel Sounds of Life

En plus de #Libérezlesshojo on voit aussi beaucoup le terme « shojogirl » sur les réseaux sociaux. Que signifie-t-il ? Peut-on parler d’un « lifestyle » ?

Avant même que #Libérezlesshojo existe, il y avait déjà une certaine esthétique sur les réseaux sociaux où on pouvait reconnaître un univers « shojogirl » sans forcément le nommer. On le voit à travers des photos et vidéos épurées, éclairées, avec des shojo mangas bien en évidence… Le mouvement #Libérezlesshojo a davantage rendu légitime le « shojogirl esthétique ». Avec #Libérezlesshojo, le mood shojogirl et les trends autour de cet univers sont devenus plus visibles avec une communauté qui est sortie du lot. Le mouvement a juste rendu plus populaire le lifestyle shojo qui existait déjà mais qui était moins visible à l’époque.

Si le mouvement #Libérezlesshojo  a eu des effets positifs, on a aussi constaté que certaines personnes ont perçu la communauté shojo comme étant « toxique ». Qu’en penses-tu ?  

Cette diabolisation que l’on a vu notamment sur Twitter se résume en un mot pour moi : misogynie. Lorsqu’un groupe de femmes osent se plaindre avec redondance et lorsque nous insistons sur une insatisfaction, nous sommes cataloguées directement comme étant hystériques. Cependant, cela fait des années que les Community Managers des maisons d’éditions prennent des remarques désobligeantes, voire insultantes lorsque des fans considèrent qu’il y a une erreur sur un titre shonen et/ou seinen.

La plupart des commentaires viennent des hommes. Est-ce qu’ils sont catalogués comme un groupe d’hystériques ? C’est moins évident. De mon point de vue, je trouve cela injuste, inégalitaire… Et malheureusement, très courant. Nous ne sommes pas toxiques et nous ne souhaitons pas manquer de respect aux personnes qui travaillent en maison d’édition, nous voulons seulement partager nos points de vue et poser des questions sur des titres que nous attendons et que nous avons hâte d’acheter. 

Pourquoi autant de détermination à défendre le shojo manga en France ? 

C’est très simple ! Je suis de nature passionnée et j’ai tendance à être en boucle sur des sujets qui me tiennent à coeur. Le shojo manga me tient à coeur et le mouvement #Libérezlesshojo, je le considère un peu comme mon enfant. De mon point de vue de lectrice, il n’y a aucune raison légitime pour lesquels le shojo manga ne peut pas être mis en avant à part… la misogynie. On peut aussi entendre que « le shojo manga ne se vend pas » mais comment peut-il se vendre si nous ne mettons même pas la moitié d’investissement par rapport à un shonen ou un seinen ?

Avant tout, je pense qu’il faudrait enlever le « rose » des jaquettes des shojo manga car cela peut rebiffer un lectorat masculin qui pourrait être intéressé par certains titres. Aussi, il est temps d’aller au-delà du stéréotype. Ce n’est donc pas demain la veille que j’arrêterai de défendre le shojo manga

Qu’espères-tu à l’avenir pour les shojo mangas en France et pour #Libérezlesshojo ? 

Tout d’abord, j’aimerais que l’on continue sur notre lancée en France : plus de nouveautés shojo mangas et que cela se pérennise. Je souhaiterais qu’il y ait le même engouement autour d’un shojo à succès au Japon comme pour un shonen, avec des collectors, des jaquettes exclusives… Comme dans les autres pays européens !

Encore aujourd’hui, le shojo mangas est mis de côté par une grande partie du lectorat qui est masculine car ils ne se sentent pas concernés. Il faut casser ce préjugé car les shojo mangas sont tellement riches ! Il faut aller au-delà de cette inégalité systémique. Ce n’est pas parce que la cible éditoriale est féminine que les hommes ne sont pas concernés. En d’autres termes, pour moi, il ne faut plus qu’il y ait de sexisme. Là-dessus, les maisons d’édition ont un rôle à jouer ! De par leur communication et leur mise en avant, elles doivent viser davantage une équité. 

Aussi, ce que j’espère c’est que le mouvement #Libérezlesshojo perdure encore. En tant que créatrice du hashtag, il est important pour moi qu’on continue d’en parler et j’aurai un grand plaisir à participer aux échanges autour du shojo et du mouvement ! 

Célia est une jeune étudiante qui n’a pas peur de se battre pour ses convictions. Dès l’âge de 18 ans, elle a baigné dans l’univers du shojo à travers des animés cultes comme Fruit Basket et Yona… Progressivement, elle s’est ensuite mise à lire des mangas et son regard sur le shojo manga en France s’est affiné au fil du temps. Personnalité forte et ambitieuse, elle n’a pas l’intention d’arrêter de dire ce qu’elle pense et parler encore toujours du shojo manga ! 

Retrouvez Célia à travers ses réseaux sociaux par ici :

De nature passionnée, Cindy partage avec plaisir ces découvertes lectures. Ses lubies du moment : les webtoons, les romans policiers, la romance (new romance et dark romances). Ce qu'elle aime ? Écrire, tout simplement !

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