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Coups de coeur

Mujina into the Deep – Un Asano plus punk, plus brutal, mais toujours fascinant

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Mujina into the Deep est un manga d’Inio Asano. Ce seinen édité chez Kana nous plonge dans un Japon futuriste en pleine dérive sociale, où les cartes d’identité déterminent littéralement votre droit d’exister, et où celles qui tombent en dehors du système deviennent des Mujina, survivant comme elles peuvent dans les marges.

Le Synopsis

Cela fait désormais une dizaine d’année que le Japon a voté la création des rights card, pour endiguer le vieillissement de la population, et que les personnes qui en sont privées deviennent des sans-droits.. Pour vivre et subvenir à ses besoins, Ubume est devenue une mujina, sorte de tueuse à gages. Elle accepte dès lors toutes les missions possibles qu’une mystérieuse personne lui confie.

En la rencontrant, Terumi, un homme dans la quarantaine, va progressivement être amené dans la partie sombre de la société japonaise…

Mon Avis

On le voulait, on l’a eu et on retrouve cette énergie si particulière à Asano, mais teintée ici d’une nervosité nouvelle. Le Japon qu’il imagine fonctionne sur un système absurde et terrifiant : un right pass qui conditionne l’accès aux droits fondamentaux. Plus de carte ? Plus de transports, plus de soins, plus de moyens de paiement… plus rien. Ceux qui en sont privés – volontairement ou non – deviennent des ombres. Des “non-citoyens”. Des Mujina. Certaines utilisent cette absence totale de statut pour devenir des tueuses à gages, presque transformées en anti-héroïnes sur les réseaux sociaux.

Le premier tome suit l’une de ces assassins, Ubume, une combattante redoutable, presque légendaire. Le manga démarre à cent à l’heure : une mission qui tourne mal, une fuite, une rencontre avec un groupe de personnes qui, malgré eux, vont modifier sa trajectoire.

Asano construit son récit comme un thriller futuriste à la sauce punk, une sorte de film d’action nerveux où les corps s’entrechoquent dans une ville écrasée par les inégalités. On pense parfois à du Tarantino futuriste… ou à du Besson en plus sale, en plus provocateur.

Et provocateur, il l’est vraiment. Mais c’est assumé. Asano ne cherche pas à être subtil dans sa dénonciation. Il tape fort, quitte à perdre ceux qui attendaient de lui une œuvre plus “sensible”, plus introspective.

Ce premier tome préfère l’impact immédiat, avec des scènes d’action éclatantes, un découpage vif, des cadrages acérés.

Visuellement, c’est incroyable. Asano reste un metteur en scène hors pair : les combats au katana sont superbes, urbains, tranchants, chorégraphiés comme des séquences de cinéma. On tourne les pages pour le plaisir des yeux, même quand l’écriture, elle, reste encore floue.

On suit aussi Morgan, un producteur de jeux vidéo au bout du rouleau, divorcé, cherchant dans les relations tarifées une manière de remplir le vide. Un personnage ambigu, pas forcément attachant, mais humain dans sa déchéance. Lui aussi se retrouve happé dans l’univers des Mujina quand il croise des adolescentes blessées qu’il choisit – un peu par hasard, un peu par instinct – d’aider. Leur rencontre fait glisser le récit vers quelque chose de plus large, plus social, plus inquiet.

Et c’est là que le manga devient vraiment intéressant. Même dans un tome très action, Asano glisse des thématiques bien réelles :
— le harcèlement scolaire, traité dans toute son horreur,
— la fugue juvénile qui explose au Japon,
— la précarité des indépendants corvéables à merci,
— les dérives d’un système qui juge la valeur d’un être humain sur une carte d’accès,
— et même des discours sur les droits des femmes, très présents dans ce tome.

Ces éléments ne sont pas encore développés en profondeur, mais ils sont là, en filigrane. On sent le potentiel. On sent surtout qu’Asano prépare autre chose derrière cette façade de thriller brutal.

Graphiquement, le manga est somptueux. Ses mises en page sont plus dynamiques que jamais, les portraits pleine page donnent un vrai souffle, et certaines planches sont d’une beauté froide magistrale. Avec ce côté punk futuriste, un peu déglingué.

Pour ma part, ce premier tome m’a vraiment plu. Une vraie claque visuelle, une ambiance dystopique prenante, et surtout un Asano qui ose repartir dans quelque chose de différent, plus frontal, plus nerveux. Oui, le scénario reste encore flou. Oui, certaines provocations peuvent paraître gratuites. Mais l’énergie qui traverse ce tome, cette sensation que tout peut exploser d’une page à l’autre… ça fonctionne. Et surtout, ça donne envie de voir jusqu’où Asano veut nous emmener.

MA NOTE : 18.5/20

🫀 Founder Kazoku , anciennement skendolero.fr. ⛩️ Travel - Japon - Manga

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