

Mangas
Yashirojima, La Forêt des Rêves Perdus – Un voyage entre Histoire et Fantastique
Les œuvres qui s’aventurent sur les terres du folklore japonais ont toujours une aura particulière, entre mystère et poésie. Yashirojima, La Forêt des Rêves Perdus, premier manga de Kaeru Utagawa publié chez Vega, s’inscrit pleinement dans cette tradition en nous offrant un recueil d’histoires où réalité et rêverie s’entrelacent au fil des pages.



Le Synopsis
De nos jours, un jeune garçon parti jouer dans la forêt s’endort au pied d’un arbre. Sous la protection du dieu renard, ses rêves l’emmènent loin dans le temps, à la découverte de ses vies antérieures.
Les dieux du rêve mettent ce dernier, jadis samurai, en face des massacres qu’il a commis, plus tard tatoueur, il vivra l’omerta post Seconde Guerre mondiale et la mise au ban de cet art subtil. Petit à petit, ce sont l’histoire et la culture du Japon qui se présentent au lecteur, par l’entremise de plusieurs clins d’œil qui raviront les initiés sans intriguer outre mesure les lecteurs lambda comme, par exemple, le jeu avec les pièces de shogi.
L’auteur livre néanmoins les clefs de son récit au travers de propos introductifs et d’une interview de fin de volume.

Mon Avis
Construit en quatre récits distincts, le manga nous entraîne à la rencontre d’âmes en quête de sens, tourmentées par leurs choix passés ou leurs aspirations inassouvies. Qu’il s’agisse d’un Occidental passionné par le Japon, d’un apprenti tatoueur face aux traditions interdites, d’un renard cherchant l’amour parmi les humains ou d’un samouraï hanté par ses actes, chaque protagoniste traverse un parcours initiatique où le surnaturel agit comme un révélateur de conscience.
Cette approche rappelle autant les contes traditionnels japonais que l’ambiance onirique des films de Ghibli, notamment dans l’idée de mondes cachés aux frontières du visible.


L’un des aspects les plus captivants de Yashirojima est la manière dont Kaeru Utagawa convoque l’Histoire du Japon pour enrichir son univers. La prohibition du tatouage au début du XXe siècle, la révolte des Aïnous contre le clan Matsumae… Ces éléments, rarement abordés dans le manga, donnent aux récits une profondeur inattendue. On aurait aimé que ces contextes historiques soient encore plus développés tant ils regorgent de potentiel, mais leur présence suffit à donner une tonalité unique à l’œuvre.
Graphiquement, le trait de Kaeru Utagawa oscille entre influences classiques et modernité. Par moments proches des estampes japonaises, par d’autres plus proches du manga contemporain, les planches jouent habilement sur les textures et les contrastes d’encre pour renforcer l’aspect intemporel des récits. L’atmosphère, souvent contemplative, s’accorde parfaitement avec cette esthétique, offrant au lecteur une véritable parenthèse hors du temps.


Yashirojima demeure une expérience sensorielle et narrative fascinante. On aurait certes aimé en lire un peu + de certaines histoires ! Mais à travers ces contes teintés de mélancolie, Kaeru Utagawa signe une première œuvre prometteuse, à la fois hommage aux légendes japonaises et exploration intime des âmes perdues. Un one-shot qui invite à la rêverie et à la réflexion, tout en éveillant l’envie de découvrir ce que l’autrice nous réserve pour la suite.
MA NOTE : 16,75/20

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